Connaitre ses missions, apprendre à gérer une classe, comprendre le fonctionnement de l’établissement ou de l’école, prendre ses repères… Alors que des débuts réussis sont essentiels pour le bon fonctionnement du service public d’éducation, le bienêtre au travail et la satisfaction de tous, que constate-ton ? Parfois du dépit, de la désillusion, souvent un sentiment d’abandon.

Comment repenser la formation l’accueil et l’accompagnement des personnels vers leur professionnalisation, leur autonomie et leur bienêtre ?

Un dossier réalisé par Laurent Alexandre, Alain Candau, Jean-Luc Évrard, Françoise Lambert, Élisabeth Ritzenthaler et Alexis Torchet. D’après le dossier initialement publié dans le magazine Profession Éducation du Sgen-CFDT n°253 – avril-mai 2017

Clés de compréhension

  • Favoriser une immersion progressive dans l’exercice du métier
  • Alterner théorie et pratique
  • Repositionner le concours en fin de M2 pour un « continuum » de formation sur deux ans
  • Développer les entraides et organiser des coopérations
  • Rompre l'isolement des débuts de carrière

Débuter dans le métier : enseignants et CPELes néo-titulaires, moins expérimentés, sont affectés sur les postes les moins demandés.

S’ils n’ont pas obtenu de poste, ils se retrouvent souvent à cumuler remplacements multiples, déplacements importants et importante charge de travail (du fait de leur démarrage dans le métier). Ces premières affectations peuvent aussi en conduire certains à quitter leurs attaches familiales pour rejoindre des académies où ils ne connaissent personne.

La moitié des stagiaires du second degré partent au moment de leur première affectation vers les académies de Créteil, Versailles ou Amiens.

En outre, de nombreux néo-titulaires découvrent le métier dans des écoles ou des établissements en éducation prioritaire. Ces postes nécessitent un engagement fort sur la durée en faveur de publics plus en difficulté, et davantage d’accompagnement, de temps d’analyse et de construction, de formations – et des équipes plus soudées. Beaucoup de conditions à réunir, donc, pour que cela fonctionne.

D’autant plus que, sans expérience suffisante, les débutants doivent trouver dans l’urgence d’autres façons d’enseigner et les moyens de construire leur autorité. À cela peuvent s’ajouter des injonctions hiérarchiques incohérentes et infantilisantes, qui obligent les entrants à trouver des réponses par eux-mêmes. S’ils n’y parviennent pas sur leur lieu de travail, auprès de leurs collègues, ces situations peuvent les conduire au bord de la démission.

Selon les individus, les affectations, l’existence ou non d’équipes éducatives, de soutien de la direction… les entrées dans le métier sont plus ou moins traumatisants, perturbants ou enthousiasmants. Les retours des fonctionnaires stagiaires montrent qu’une des principales difficultés est le fait que la prise de responsabilité en classe n’est pas du tout progressive.

Lire aussi : Bienvenue dans votre nouvelle académie : témoignages de professeurs stagiaires

 

LA FORMATION doit être ADAPTÉE, INTÉGRÉE ET PROGRESSIVE

Avec la création des Écoles supérieures du professorat et de l’éducation (Éspé) et le retour d’une année de stage en alternance, la formation initiale s’est améliorée, mais le caractère progressif de l’entrée dans le métier n’est pas encore suffisamment garanti.

Pour le Sgen-CFDT, le concours doit être repositionné en fin de M2 pour garantir un « continuum » de formation sur deux ans avec des modules de formation, adossés à la recherche en éducation, intégrant différents éléments du métier de professeur et de conseiller principal d’éducation (CPE). L’objectif est de permettre une véritable professionnalisation.

Lire notre article : Entrée dans le métier des enseignants et CPE. Un cahier des charges trop lourd ?

Enseigner est un métier qui s’apprend et qui nécessite un temps de formation long et propre à chacun.

Des stages en observation, en pratique accompagnée puis en responsabilité permettraient une immersion progressive dans l’exercice du métier. Le concours de recrutement se positionnerait alors dans une temporalité qui permettrait au futur enseignant ou CPE l’acquisition d’un ensemble de connaissances et de compétences indispensables à l’entrée dans le métier.

Mais les néo-titulaires devraient eux aussi bénéficier de temps de décharge pour continuer à se former, toujours dans un souci de mise en responsabilité progressive, avec des stages d’observation et de pratique accompagnée par des tuteurs de terrain.

Le Sgen-CFDT l’affirme depuis longtemps : enseigner est un métier qui s’apprend et qui nécessite un temps de formation long et propre à chacun.

Pour en savoir plus :

Le Sgen-CFDT défend une conception exigeante de nos métiers

À travers son souci de formation, le Sgen-CFDT défend une conception exigeante de nos métiers – métiers de concepteurs, d’ingénieurs, de professionnels de l’éducation – solidement outillés sur le plan des connaissances disciplinaires, des savoirs didactiques et pédagogiques, des professionnels capables de distance critique par rapport à leur pratique.

Les élèves devenant plus difficiles à mobiliser, les enseignants déploient de plus en plus d’énergie pour trouver les moyens d’y parvenir.

Développer des entraides, des coopérations, des coordinations…

Ce souci était évidemment moins grand au temps d’une École qui n’accueillait que les élèves les plus motivés. Ce travail important ne peut être conduit seul. Il suppose le développement d’entraides collectives, de coopérations, de coordinations de situations choisies et mises en place par une équipe se concertant.

En intégrant cette dimension, la formation continue devrait permettre à tous les personnels et notamment aux débutants de construire des activités, des projets collectifs et d’être plus à l’aise dans l’exercice de leurs missions. Construire en équipe, de manière pertinente et inventive, les moyens d’une pédagogie différenciée, permet de sortir de l’individualisme défensif générateur de souffrance.

Pour aller plus loin :

Débuter dans le métier : enseignants et CPEROMPRE L’ISOLEMENT DES DÉBUTS DE CARRIÈRE

La culture bien ancrée de la préparation de concours renforce l’individualisme et la solitude, acceptée ou subie dans la pratique professionnelle.

Si les entrants dans le métier sont une priorité syndicale pour le Sgen-CFDT, c’est parce que notre syndicat est soucieux de les sortir de leur isolement pour qu’ils rejoignent un collectif syndical capable, avec eux, d’agir sur leurs réalités.

Des équipes de militants, partout dans les académies, viennent donc à la rencontre des stagiaires dans les Éspé ou sur leur lieu de stage. Elles sont régulièrement présentes pour les écouter, répondre à leurs questions, et leur proposer une aide personnalisée, par exemple en matière de mouvement.

Le Sgen-CFDT a également misé sur des outils de communication variés, permettant d’offrir à tous des informations sur leurs droits et leur carrière (site Sgen+), mais aussi de mutualiser des ressources pédagogiques (site ressources).

Enfin, les équipes syndicales proposent des rencontres pour échanger sur les pratiques professionnelles et les problèmes rencontrés, des colloques et des formations pour se ressourcer.

Améliorer les débuts d’un collègue dans son école ou son établissement, c’est possible. Ne serait-ce qu’en l’accueillant et en l’aidant à prendre ses repères.

Pour en savoir plus :

Pour aller plus loin...

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  • ENQUÊTE STAGIAIRE 2018 : UNE ESPE SOURDE AUX REVENDICATIONS?